San Martin, el Libertador
José Francisco de San Martin y Matorras naît en 1778 dans le Vice-royauté du Rio de la Plata (dont une partie est l’actuelle Argentine). Sa famille déménage en Espagne où il intègre l’armée espagnole. Il combat dans le nord d’Afrique, puis dans la péninsule ibérique contre la domination napoléonienne et participe notamment à la première grosse défaite de Napoléon à Bailén. Le 25 mai 1910 commence la guerre d’indépendance sur l’autre continent. Il quitte l’armée espagnole et part pour Buenos Aires. En 1812, à 34 ans, il est lieutenant-colonel. Il se marie avec Maria de los Remedios de Escalada, 14 ans, de famille riche et impliquée dans la lutte patriotique. Il se bat alors pour l’indépendance des Provinces Unies du Rio de la Plata, et dans ce cadre et grâce à l’influence de sa belle-famille, crée le fameux régiment de grenadiers à cheval. Sa première bataille sera celle de San Lorenzo où il prend la tête de la troupe et manque de se faire tuer, mais un vaillant soldat, Cabral, s’interpose et meurt à sa place (comme quoi ça n’arrive pas qu’au cinéma). Il remplace ensuite le General Belgrano qui faisait un peu n’importe quoi au commandement des troupes du Nord, et élabore son plan d’indépendance hispano-américaine qui consiste à éliminer tous les noyaux royalistes puisque ce sont eux qui permettent au régime colonial de se maintenir. En 1817, il libère le Chili depuis Mendoza, via les Andes, puis attaque Lima, le centre de pouvoir espagnol en Amérique du Sud, par la mer. En 1821 une partie du Pérou est indépendante. Le « Protecteur du Pérou » confie la finalisation de la tâche à Bolivar, et revient à Buenos Aires. Il y est accusé de s’être transformé en conspirateur, et sa femme décède de la tuberculose en 1823, à 26 ans (du coup c’était peut-être pas si mal de se marier tôt en fait…). Cela, ajouté au contexte de luttes internes entre fédéralistes et unionistes, le convainc à se réfugier en Europe avec sa fille Mercedes. Le « père de la patrie » argentine n’y reviendra que brièvement et refusera notamment le poste de gouverneur de la province de Buenos Aires. Le « papi immortel » terminera ses jours à Boulogne-sur-Mer en 1850, n’ayant qu’une obsession, celle de l’éducation de sa fille. Il rédigera d’ailleurs ses idéaux à ce propos dans les Maximes pour Merceditas. Si c’est pas une belle fin…
Deux polémiques existent à son égard : Etait-il franc-maçon ? On est sûr qu’il a fait partie de loges secrètes mais leur nature exacte n’a pas été prouvée. Et était-il métisse, né d’une mère guarani ? Ce qui serait assez beau pour l’Argentine marquée en grande majorité par des blancs-becs d’origine européenne.
Ah, je finis par une petite question pour voir si vous avez bien suivi « ¿ De qué color era el caballo blanco de San Martin ? » (De quelle couleur était le cheval blanc de San Martin ?)
Carlos Gardel
Le roi du tango ! Fils de Marie Berthe Gardes et de père inconnu, Charles Romuald est né à Toulouse en 1890 (n’en déplaise aux Uruguayens qui affirment qu’il est des leurs, confusion due à des changements d’identités pour occulter des faits d’escroquerie…). Elevé par sa mère, dans la précarité, il passe sa jeunesse à Buenos Aires et obtient la nationalité argentine en 1923. Il finit par s’installer dans le quartier de l’Abasto, qui est aujourd’hui tout à son effigie. Il perce grâce au chanteur uruguayen José Razzano avec qui il formera un duo. Les performances de celui qui « chaque jour chante un peu mieux » le transformeront en emblème du tango au niveau international. Il fera aussi un peu de cinéma. Il décède dans un accident d’avion en 1935, en plein apogée de sa carrière.
Les curieux de musique argentine pourront aussi jeter un coup d’œil à des artistes comme Astor Piazzolla (toujours dans le tango), Luis Alberto Spinetta ou el Indio Solari (rock).
Che Guevara
Que celui qui n’a jamais entendu parler du « Che » sorte de la salle ! Eh oui, tout le monde connaît l’image du révolutionnaire argentin, maintenant si commercialisée, brandie à tout va, mais qui a ainsi perdu un peu de son essence première. Petit rappel, donc.
Ernesto Guevara Lynch de la Serna est né à Rosario, la troisième ville du pays, le 14 juin 1928, dans une famille aristo mais qui lisait Marx donc ça va. « Ernestito » passe ses premières années entre Palermo, San Isidro et Recoleta, quartiers typiques de classe haute. La famille déménage à Alta Gracia dans la province de Cordoba lorsqu’il a deux ans car « Teté » a de gros problèmes d’asthme et qu’il paraît que l’air y est meilleur. Ses problèmes de santé l’empêchent d’aller à l’école jusqu’à ses huit ans : c’est sa mère qui s’occupe donc de son éducation à la maison, et il se découvre une passion pour la lecture. Plus tard il se lance dans des études de médecine, fait un peu de rugby, s’intéresse de plus en plus à la philosophie sociale marxiste, et commence à voyager en stop, en vélo ou en moto à travers toute l’Argentine et l’Amérique latine. Ses voyages l’ont mis au contact des travailleurs, des plus démunis et des marginalisés, ce qui approfondit sa pensée révolutionnaire et anti-impérialiste et le convaincra de s’engager dans la guérilla. Aaaah les voyages… ce fut le déclic ! Il rejoint Fidel Castro et sa clique (le frère Raul, Camilo Cienfuegos…) au Mexique où ils préparent la Révolution cubaine. Débarquement à 82 par le « Mouvement du 26 Juillet », une vingtaine seulement survit et se réfugie dans la Sierra Maestra d’où s’organise la guérilla. Prise de Santa Clara par 350 guérilleros contre 3500 militaires. Fuite du dictateur Batista. La Havane est prise en 1959. Guevara met en place la réforme agraire, les nationalisations et la planification centralisée. Après quelques missions importantes pour les relations de Cuba avec le bloc socialiste il continue son combat internationaliste indispensable pour vaincre l’impérialisme, hors de Cuba donc, ce qui arrange bien Fidel. Ernesto Guevara a mis ses idées sur papier et critique la politique de l’Union soviétique (car elle prône le socialisme dans un seul pays et non l’internationalisme, se base sur les milieux urbains et non ruraux, et commence une coexistence pacifique alors qu’il faut se battre jusqu’à la déroute de l’impérialisme). Il continue à promouvoir la lutte armée généralisée en Amérique latine. Il tente notamment des actions en Argentine mais échoue et part alors pour l’Afrique. Ernesto Guevara voit la République Démocratique du Congo comme un foyer à partir duquel pourrait se propager la Révolution à tout le continent mais son voyage en 1965 est une nouvelle déroute notamment due à la méconnaissance des réalités du terrain. Il se tourne donc vers la Bolivie, où il sera finalement capturé par l’armée et exécuté le 9 octobre 1967.
« El Che » est devenu une icône pour les mouvements marxistes révolutionnaires et la lutte des plus pauvres et opprimés contre l’impérialisme américain et le capitalisme. Ses détracteurs de leur côté, le traitent de terroriste pour les exécutions sommaires auxquelles il a procédé personnellement (« Nous avons fusillé, nous fusillons et nous continuerons à fusiller tant qu’il sera nécessaire. Notre lutte est une lutte à mort. » prononce-t-il lui-même à l’ONU) et la création de camps de torture.
« Hasta la victoria siempre ! » A vous de vous faire une opinion.
Julio Cortázar
Né en Belgique en 1914 et décédé d’une leucémie en France en 1984, encore un argentin très français. Après une enfance dans son pays, Julio Florencio Cortázar Descotte s’exile dans le nôtre lorsque Perón arrive au pouvoir, et finira même par demander la nationalité française en signe de protestation contre la dictature militaire argentine des années 1970. Ecrivain parmi les plus réputés en Argentine, il s’inscrit dans le surréalisme et est surtout connu pour ses nombreuses nouvelles et poésies. On notera son roman très conceptuel : Marelle (Rayuela en espagnol) de 1963, qui peut se lire de manière linéaire ou non… Impliqué, il s’intéresse aux questions des droits de l’homme et à la gauche politique latino-américaine (il soutient en particulier la Révolution cubaine et la révolte sandiniste au Nicaragua).
Mon choix s’est arrêté sur lui car l’année 2014 était « l’année Cortázar » en Argentine, mais ne manquez pas la littérature de Jorge Luis Borges.
Eva Perón
Maria Eva Duarte naît en 1919 dans une famille modeste de la province argentine. Son père décède lorsqu’elle est jeune, et elle décide de partir seule à Buenos Aires où elle devient actrice (même si actuellement on se moque un peu de ses non-talents) et présentatrice d’une émission de radio très écoutée. En 1944 elle rencontre le colonel Juan Domingo Perón à un événement caritatif au profit des victimes d’un grave tremblement de terre dans une ville de l’intérieur argentin. Ils se marient deux ans plus tard, ce qui est assez mal vu en particulier chez les militaires qui n’aiment pas cette alliance d’un gradé avec une femme du peuple. Maria Eva Duarte de Perón participe activement à la campagne de son mari pour la présidence de la République et devient première dame en 1946. Fait d’autant plus remarquable car loin d’être de coutume en particulier en Argentine et à cette époque, elle s’implique totalement dans la politique du pays : à travers la Fondation Eva Perón qui œuvre pour les plus démunis, puis via le Parti Péroniste Féminin après avoir permis l’obtention du droit de vote des femmes en 1946. Elle est très attachée au monde ouvrier et a donc un contact particulier avec ses « descamisados » (« sans-chemise », les travailleurs). Elle est adulée par grand nombre d’Argentins et a beaucoup compté dans la popularité de son mari. Ceux qui la désapprouvent sont surtout les opposants à Juan D. Perón. Son influence est telle qu’elle part au nom de son mari pour une tournée européenne en 1947 pendant laquelle se produisent des rencontres historiques comme celle avec le dictateur espagnol fasciste (et machiste) Franco, ou avec le Pape Pie VII… En 1952, Evita décède d’un cancer à 33 ans ce qui renforce encore le mythe qui s’est créé à son égard. Ses funérailles provoquent un rassemblement impressionnant et plein d’émotion. Même éteinte elle est encore très présente, tout d’abord avec l’histoire de l’enlèvement de son cadavre, puis encore actuellement au travers des discours et hommages.
Mercedes Sosa
Naître le jour de l’indépendance de son pays (le 9 juillet) dans la ville où fut signée la déclaration (Tucuman), et l’année du décès accidentel de l’icône du tango Carlos Gardel (1935)… tant de coïncidences prédisent forcément un destin particulier... Haydée Mercedes Sosa, appelée Marta par ses proches (car c’est le nom que souhaitait sa mère mais comme papa ne « s’en souvenait plus » au moment de l’inscrire au registre civil il l’a changé en Haydée), commence à chanter à 15 ans à la radio sous le nom de Gladys Osorio pour que son père ne le découvre pas. Jusqu’ici rien de plus normal, n’est-ce pas ? Mercedes Sosa sort son premier album en 1962 et forme rapidement le « Mouvement de la Nouvelle Chanson », avec des collègues, qui œuvre pour la promotion de la musique folklorique et populaire native. En 1965 son mari l’abandonne avec son enfant, ce qui l’affecte beaucoup. Elle sera d’ailleurs sujette à des phases dépressives à plusieurs moments de son existence. Elle embrasse tout au long de sa vie les causes de la gauche politique latino-américaine. De parents péronistes, elle le sera elle-même jusque dans les années 1970 où elle intègre le parti communiste. Pendant la dictature des années 1970, la « Negra Sosa » (surnom affectueux donné en référence à ses origines indigènes calchaqui) est inscrite sur liste noire et ses chansons sont interdites. Elle tente de rester en Argentine mais est arrêtée pendant un concert qu’elle donne à La Plata. En 1979, un an après le décès de son second mari, elle part en exil à Paris puis Madrid. Elle revient en 1982 puis doit repartir jusqu’à l’instauration de la démocratie en Argentine un ou deux ans plus tard. « La Voz de América » (la voix de l’Amérique) défend la fraternité entre les peuples américains et ne cesse de se battre contre les injustices sociales et la discrimination contre les peuples indigènes américains, pour les droits de l’homme et la préservation de l’ordre démocratique, et enfin pour la préservation de l’environnement. Elle participe à des concerts en appui à des causes comme le Concert pour la Paix en Amérique centrale en solidarité avec le gouvernement sandiniste nicaraguayen. Elle apporte aussi son soutien à Cristina Kirchner, l’actuelle présidente.
Son œuvre est immense, sa reconnaissance totale et internationale. Ses deux derniers albums, enregistrés peu avant son décès en 2009, sont d’anthologie, réunissant les plus grands noms de la musique latino (Luis Spinetta, Soledad, Léon Gieco, Charly Garcia, Calle 13…). Mercedes Sosa s’éteint le 4 octobre 2009 des conséquences d’une maladie endémique en Amérique latine liée à la pauvreté rurale. Son corps a été veillé au Congrès de la nation, et ont été décrétés trois jours de deuil national. Je clôture ce petit topo par les mêmes mots avec lesquels le président du Brésil de l’époque, Lula da Silva, finit son hommage à cette grande dame : « ¡ gracias Mercedes, « que nos ha dado tanto » ! »
Diego Maradona
El « pibe de oro » (gamin en or), l’un des meilleurs joueurs de football de tous les temps. Mais si !... celui de la controversée « mano de D10S » (main de Dieu, but marqué volontairement avec la main lors d’un match en quarts de finale de coupe du monde contre l’Angleterre en 1986). Brillant sur le terrain, dribbleur hors pair, il est aussi grincheux, violent et tricheur (« en bon argentin » se moquera-t-ton ?). Quelques petits problèmes de drogue aussi, avec un passage à Cuba pour se soigner… Diego Armando Maradona n’est pas resté longtemps au fameux club de la Boca mais y fait quand même figure de symbole. Le numéro 10 de l’équipe nationale en deviendra brièvement le sélectionneur. L’homme, quoi qu’on puisse en penser, est vénéré en Argentine et dans le monde. Il existe même une Eglise maradonienne… Bon, et la relève est d’ores et déjà assurée par le petit Messi (avec un nom pareil ça promet).
Mafalda
Héroïne de la BD emblématique d’Argentine, pensée et dessinée par Quino. Mafalda est une petite fille toute innocente à travers laquelle l’auteur fait passer ses réflexions sur la politique, l’économie et la société. Plein d’humour, ça fait plus de 50 ans que ça dure, et ça a été bien sûr traduit dans pas mal de langues… dont le français.
Le Pape François
Souvenez-vous : en 2013 le Pape Benoît XVI renonçait à ses fonctions. Eh bien au grand bonheur des Argentins, ce fut leur cher Jorge Mario Bergoglio qu’on choisit pour reprendre la place vacante dans la papamobile. Déjà auparavant très aimé en Argentine, il est connu pour sa grande humilité, sa préoccupation particulière pour les plus démunis ou marginalisés, et son ouverture au dialogue avec les autres croyances. Premier pape jésuite ainsi que latino-américain (et deuxième pape non-européen), il a choisi son nom en hommage à la vie simple et pour la paix de Saint François d’Assise. Bien que conservateur dans les valeurs, il s’agit d’un pape assez moderne, avec un discours direct et simple, qui a déjà changé l’image de l’Eglise entachée par des scandales. Lui-même est au centre d’une controverse quant à son rôle pendant la dictature argentine des années 1970 : il aurait refusé d’aider des prêtres victimes de répression... ou même appuyé le régime !... Affaire à suivre. Pour l’instant ce leader si particulier et influent continue à prêcher la paix dans le monde depuis le Vatican.
Un peu de politique, un peu d’humour, un peu de sport, un peu d’art… Des hommes mais aussi des femmes influentes. Une vie difficile, des drames, des maladies, un esprit révolutionnaire, des liens avec la France. Une influence mondiale.
L’Argentine n’a pas été trop mal dotée. Espérons que ça dure et que je pourrai refaire un nouveau papier dans les prochaines années.
Je finis mes carnets pour Vanosc avec ces présentations. En espérant vous avoir ouvert un peu à l’univers argentin et que vous continuerez à y plonger par vous-mêmes via des recherches ou sur le terrain !
Bon week-end argentin en Ardèche, profitez bien de la découverte qui s’offre à vous.
Mélanie.
Notre site remercie bien vivement Mélanie pour ses trois carnets de voyage qui seront précieusement archivés dans la rubrique correspondante (voir onglet à gauche dans la page d’accueil).
Ses carnets ont été exposés lors du fameux week-end..
Bravo pour ses vrais talents journalistiques
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Bravo pour ses vrais talents journalistiques
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