Grézé Pénaous et autres danseries
TEXTES DE Nicole POINAS avec DES CITATIONS DE BREL et de FERRAT
Les pas perdus dans les sentiers buissonniers, dans les chemins de traverse, ne sont pas des pas perdus, car c’est là que se trouve l’essentiel.
La danse qui raconte la vie avec gravité ou malice nous permet de n’être pas perdus, en semant ça et là quelques pas, quelques empreintes.
1
TOI
« Gentil musicien
Fais moi rêver
Jusqu’au matin
Reste courbé
Sur ton accordéon
Ton accordéon
Tout blanc
Fais rêver, fais valser
Au gré des ans.
Gentil musicien
Fais moi rêver
Aux quatre coins de vie
Et pour qu’on lui pardonne
La vie met ses cheveux gris
Et pour nous accordéonne. »
Jacques Brel-Extrait de l’accordéon de la vie
2
LUI
Il est de ce pays, aux roches grises, rongées par les lichens, de ce pays rugueux, au sol tourmenté, aux brumes éternelles.
Il est de ce pays, dont on ne sait pas si c’est lui qui modula l’homme ou si c’est l’homme qui le modula.
Il est de ce pays, rose de ses bruyères, jaune de ses genets, subtilement mauve de ses fayards dénudés.
Il est de ce pays où les hommes remontaient la terre sur leur dos et la confisquaient en érigeant des murs et des murs .
Il est de ce pays contre lequel on se bat parfois pour assurer son existence ……mais que l’on aime toujours
Assis, seulement parfois, sur ce banc de bois, il est le maître de ce pays ...
3
LUI
« Parfois, il nous arrive avec son grand chapeau
Et son manteau de laine que suivent les troupeaux
Le berger
Il monte du printemps quand s’allongent les jours,
Ou brûlé par l’été, descend vers le bourg,
Le berger
Quand ses bêtes s’arrêtent pour nous boire de l’eau
Se met à danser à l’ombre d’un pipeau,
Le berger »
Jacques Brel- Extrait de « Les bergers »
4
LUI
Le berger vous le dira, qu’il y a herbe et herbe. La plus fine et la plus nourrissante, c’est la GREZE, de l’adret : l’herbe de soleil. Si aucune dent ne la broute, elle s’épuise à attendre.
Il ne faut pas croire que l’herbe est la même partout. Folles, grasses, hautes, rases,mauvaises, ces herbes sont là, à l’ombre, au soleil, au bord de l’eau.
Puis, il y a ces fausses herbes, vertes d’abord et qui de matin en matin, grandissent, s’enflent, se dorent et donnent le grain, les blés verts .
5
TOI
« Donne moi la main
Le soleil a paru
Il nous faut prendre le chemin
Le temps des moissons est venu
Le blé nous a trop attendus
Et nous attendons trop de pain
Ta main sur mon bras
Pleine de douceur
Bien gentiment demandera
De vouloir épargner les fleurs
Ma faucille les évitera
Pour éviter que tu ne pleures.
Les blés sont pour la faucille
Les soleils pour l’horizon
Les garçons sont pour les filles
Et les filles pour les garçons . »
Jacques Brel- Extrait de « Les blés »
6
LE CHATAIGNIER
« J’entends les vieux planchers qui craquent
J’entends du bruit dans la baraque
J’entends j’entends dans le grenier
Chanter, chanter, mon châtaignier.
Bien à l’abri dans ma sous-pente
Moi, j’entends chanter la charpente
Ce n’est pas du bois vermoulu
J’entends les poutres qui se plaignent
De ne plus donner de châtaignes
En supportant mon toit pointu.
REFRAIN
Quand on devient poutre maîtresse
C’est tout le toit qui vous oppresse
Il faut chanter tout doucement
La chanson de ses origines
Celle qu’il me chante en sourdine
En y mettant du sentiment.
REFRAIN
C’est surprenant, mais c’est logique
Il chante la chanson magique
Qu’il a apprise au fond des bois
Il me chante une chanson tendre
Que je suis le seul à comprendre
Quand la nuit vient à petits pas .
REFRAIN
C’est vrai pourtant qu’il nous protège
Contre le froid, contre la neige
Tout en berçant mes insomnies
Ce n’est pas une chanson triste
Mon châtaignier est un artiste
Qui continue d’aimer la vie. »
Jean FERRAT- Le châtaignier
7
ELLE
Elle se cache dans une bogue : des piquants au-dehors, du velours en dedans, comme le cœur des Ardéchois. Elle s’entoure d’une pellicule brune et résistante, elle s’enveloppe d’une peau fine et ligneuse : La châtaigne .
Mais connaissez-vous les PENAOUS ?,Ce sont les châtaignes séchées nuit et jour à la fumée du bois de châtaigner dans les séchoirs des greniers ou dans les clèdes .
8
ELLE
Elle s’agrippe, « s’agrappe » au flanc ensoleillé.
Sur les terrasses, la vigne dessine des chevrons verts, d’or, d’ocre, bruns, pourpres.
LUI, attend la promesse du grain engorgé.
Bientôt, il se lèvera de sa chaise, ira au buffet, sortira un verre et une bouteille de vin .
Sa main forte fera le tour du verre. Il boira lentement, avec plaisir. Puis, il essuiera discrètement, du dos de la main, sa bouche et ses moustaches fines, deux fois.
Le vin est une chaleur de plus et aussi le prétexte à ménager des plages de silences dont la réflexion profite .
9
ELLE
Elle est de ces maisons basses, humbles et nobles à la fois.
Elle est de ces maisons à la porte toujours ouverte, enchevêtrées les unes aux autres, offertes au levant.
Elle est de ces maisons noyées de clair-obscur, bercées par le froissement des eaux vives, là où la terre prend la transparence du ciel.
Elle est de ces maisons qui s’emplissent de rires, d’après, de demain.
10
ELLE ET LUI
« La fille que j’aimera
Aura sa maison basse
Blanche et simple à la fois
Comme un état de grâce
La fille que j’aimera
Aura des soirs de veille
Où elle me parlera
Des enfants qui sommeillent
Et moi je l’aimerons
Et elle m’aimera.
Pavoiserons tous deux
Notre vie de soleil
Avant que d’être vieux ;
Avant que d’être vieille. »
Jacques Brel- Extrait de « La bourrée des célibataires »
11
EUX ET ELLES
« Ah ! qu’elles sont bêtes les femmes
D’obéir à leurs maris
J’en ai un comme les autres
Jamais, je lui obéis .
En passant devant le maire
Tu avais pourtant promis
En présence de ta mère
D’obéir à ton mari.
Alors, j’étais jeune fille
Je voulais me marier
Mais le lendemain des noces
C’est moi qui l’ai commandé »
Extrait d’un chant traditionnel
12
NOUS
Tenir dans la solitude des pierres, dans l’âpreté des massifs,
Trouver, dans le jour gris, la dernière feuille aux éclats de soleil
Quitter les forêts profondes, aller plus loin, quérir l’orée,
Partir, s’étourdir aux parfums des myrtilles et des foins coupés
Rêver, s’envoler et fredonner ce qu’emporte le vent .
13
« C’était hier et c’est demain » disait Aragon.
Oui, danser, c’est :
mettre le présent et le futur en question, en construction,
s’engouffrer dans le courant qui circule entre mémoire et imagination à la recherche d’une tradition entre évanescence et naissance dans la mobilité du temps,
engager un « avant-deux » pour une culture qui vit, se nourrit, s’identifie, identifie et construit .
Car « rien n’est plus jeune qu’une vieille danse ».
(photos ci-dessous YB)
- le public sous le charme de la ruralité
- Derrière Clarisse, Denis et Jean-Claude, les accordéonistes attitrés des Pas Perdus...
- ...qui ont conjugués leurs talents avec le groupe de musique trad d’Ardèche Musique et Danse
- ...piloté par Joël Meiller
- Parfois "le chant" apportait un heureux complément
- Alain et le jeune régisseur d’AMD
- Le décor....
- ...rural....
- ...fleuri...
- ...et désaltérant était posé.
- Petit délire final...
- Retrouvailles de Max avec René, Michel, marcel en compagnie de Roland
- Cette soirée restera gravée comme une belle soirée de spectacle et de solidarité pour le secours populaire.
- Des Pas Perdus dont on apprécie toujours les préstations...
- ... et qu’on peut retrouver tranquillement chez soi par l’intermédiaire d’un excellent DVD réalisé par Montmiandon films